Homélie du Dimanche 14 juin 2020

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C’est une expression qui revient souvent dans la bouche de nos contemporains : « la vie n’est pas un long fleuve tranquille ». Dans son cheminement, au jour le jour, l’être humain rencontre des épreuves de toute sorte. C’est aussi toute l’histoire du peuple de Dieu qui nous est illustrée par les textes de ce dimanche de la fête du sacrement du corps et du sang du Christ. A peine délivré de l’esclavage d’Egypte, le peuple de Dieu connaît, pendant 40 ans, l’épreuve du désert, « pays de la sécheresse et de la soif » (première lecture). La Bible raconte que Dieu lui donna la manne pour apaiser sa faim corporelle. Elle dit aussi que ce fut l’occasion de découvrir que « l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche de Dieu ». Car la parole de Dieu est, elle aussi, une nourriture d’un autre ordre.

Il en va de même dans notre vie chrétienne. Dans ce domaine, les épreuves ne manquent pas non plus : en plus des souffrances humaines communes à la condition humaine, le chrétien rencontre les difficultés à vivre chaque jour selon l’Evangile. Et pour qu’il en ait la force, le Christ lui donne une nourriture spirituelle : sa parole vivante, et une nourriture extraordinaire, « sa chair donnée pour la vie du monde », au grand étonnement de ses auditeurs qui n’y comprennent rien. Jésus pourtant le dit sans détour : « si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’Homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous » (évangile).

L’Eucharistie dont nous avons manqué durant toute cette période de confinement est devenue le signe de cette communion spirituelle qui dépasse la perception concrète de la célébration de la messe. Ces 2 mois de privation nous ont permis de saisir un peu mieux l’écart qui existe entre ce que nous vivons physiquement dans la célébration de la messe, et la réalité de ce que Dieu accomplit dans le mystère de la foi en la vie divine. En effet, il n’est pas question de douter que toutes celles et ceux, dont nous étions,  qui se sont unis à la prière de l’Eglise, grâce aux moyens techniques actuels,  la messe à la Télévision, ou  les propositions des paroisses par le biais d’Internet, ont véritablement été unis dans la communion des saints. Lorsque nous avons vu le pape François, seul sur la place st Pierre, bénir la ville « Urbi et Orbi », tous les croyants du monde, nous avons tous été affectivement atteints par l’apparente tristesse de l’événement, mais dans le même  temps, nous nous sommes tous sentis bénis par le Saint-Sacrement, au même titre que les quelques personnes présentes dans la basilique st Pierre.  

A ce sujet, Je voudrais vous citer quelques extraits de l’interview du Père Tomas Halik paru dans le journal « La Croix » du 24 avril dernier. Le Père Tomas Halik est un prêtre tchèque, professeur de sociologie à l’université de Prague, et qui a été prêtre clandestin durant le régime communiste.

Voici ce qu’il dit : « L’Eglise devrait être un « hôpital de campagne ». Par cette métaphore, le pape veut dire que l’Eglise ne doit pas rester dans un splendide isolement, mais doit se libérer de ses frontières et apporter de l’aide là où les gens sont physiquement, mentalement, socialement et spirituellement affligés. Oui, c’est comme cela que l’Eglise peut se repentir des blessures infligées tout récemment par ses représentants aux plus faibles…Mais je ne peux m’empêcher de me demander si le temps des églises vides et fermées n’est pas une sorte de vision nous mettant en garde contre ce qui pourrait se passer dans un avenir assez proche ….N’avons-nous pas déjà été avertis par ce qui se passe dans de nombreux pays, où de plus en plus d’églises, de monastères et de séminaires se vident et ferment leur  porte ? Pourquoi avons-nous pendant si longtemps attribué cette évolution à des influences externes (« le tsunami séculier ») au lieu de comprendre qu’un autre chapitre de l’histoire du christianisme arrive à son terme et qu’il est temps de se préparer pour un nouveau ? … Nous avons beaucoup trop cherché à convertir le monde et beaucoup moins à nous convertir nous-mêmes par un changement radical de « l’être chrétien ».

Ce sont des paroles dures à entendre, je vous l’accorde, mais qui sont autant d’interrogations pour l’Eglise en général, et pour nous, en particulier. Ce que dit le Père Tomas Halik nous ramène au cœur du mystère du sacrement du Corps et du Sang du Christ :  participer au seul et même corps du Christ réalise entre les chrétiens une unité profonde : l’Eglise nourrie par le sacrement du corps et du sang du Christ, devient elle-même le Corps du Christ, qui témoigne de son amour au milieu du monde sauvé par lui. Malgré toutes les questions qui sont posées par la situation d’aujourd’hui, ne doutons pas de la sollicitude du Christ, envoyé par le Père, présent dans son Eglise, qui l’anime par la force de son Esprit.      

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