Homélie du Dimanche 7 juin 2020 – Sainte Trinité

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On raconte cette histoire concernant saint Augustin : Un jour, il marchait au bord de la mer, priant et cherchant à comprendre le mystère de la sainte Trinité. Son attention fut attirée par un enfant qui, en va-et-vient incessant, allait puiser de l’eau dans la mer, pour la verser  dans un trou qu’il avait creusé dans le sable.  L’évêque lui demanda ce qu’il faisait. L’enfant – c’était, dit-on, un ange – lui répondit : « Je veux mettre toute l’eau de la mer dans ce trou » « Mais c’est impossible ! » lui dit Augustin. Et l’enfant de lui objecter : « j’aurai vidé la mer de son eau avant que toi tu n’aies compris le mystère de la Sainte Trinité ».

Je ne sais pas si cette histoire est authentique, mais elle a au moins le mérite de nous faire comprendre que c’est inutile de chercher à expliquer ce mystère, avec notre logique mathématique.

Et cette  difficulté  est bien la preuve que ce ne sont pas des humains qui ont inventé cela. Quand on parle des religions monothéistes (le Judaïsme, l’Islam, et le Christianisme), on a tendance à les prendre toutes d’un bloc. En fait, on oublie que le christianisme est un monothéisme d’une espèce toute particulière.  Il ne renie rien de l’unicité et de l’unité de Dieu, le Seigneur devant lequel s’est prosterné Moïse (première lecture). Mais il refuse de partir d’une idée abstraite de Dieu, fabriqué a priori par l’esprit humain en quête d’absolu. Son point de départ, c’est la figure concrète de Jésus, Christ et Fils de Dieu qui se révèle dès le début comme un Dieu d’amour venu à la rencontre de l’homme : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle ». (évangile).

Tout part de Jésus, qui, en venant sur la terre, a reçu de son Père, la mission de sauver le monde. Jésus est une personne humaine, distincte de celui qui l’envoie, mais qui est aussi avec lui en relation d’une intensité incomparable. Sans cette mission du Christ, les hommes n’auraient pas su que le Dieu unique se décline en trois personnes : le Fils envoyé, le Père qui l’envoie, et l’Esprit, lien d’amour entre eux. Et ce lien d’amour entre les personnes divines établit aussi avec les personnes humaines, une communion sans pareille.

Si on lit le Nouveau Testament, on découvre qu’il est tout entier habité par Dieu. Mais pas un Dieu solitaire. Jésus parle constamment de son Père et de l’Esprit. Il est reconnu comme le Fils de Dieu. Saint Paul, dans sa salutation aux Corinthiens, communauté marquée  pourtant par de graves dissensions entre l’apôtre et la communauté, mentionne les trois personnes divines : « que la grâce de Jésus-Christ Notre Seigneur, l’amour de Dieu et la communion de l’Esprit-Saint, soient  avec vous tous ».  La tendresse, la miséricorde, la fidélité, le salut, l’amour, il n’y a pas d’autres manières de parler du Dieu des chrétiens. Saint Jean ne trouve rien de plus grand à dire : « Dieu est Amour ». « Dieu est plus grand que notre cœur ».

Ce ne sont  pas les hommes qui ont pu invener l’amour. C’est un don qui nous est fait, qui vient de plus loin que nous, d’une source qui nous dépassera toujours. La source de tout amour, c’est Dieu. Partout où il y a de l’amour, il y a présence de Dieu. L’amour de Dieu ne se réduit pas, ne s’assimile pas à quelque religion que ce soit. Il dépasse radicalement nos propres expériences d’amour, si belles et si grandes soient-elles. C’est un amour dont nous ne pourrons jamais faire le tour et en être propriétaires, car l’amour de Dieu n’a pas de frontière.

Il a fallu attendre le IVème siècle pour que le dogme trinitaire soit fixé. Et nous n’aurons pas assez de notre existence pour inventorier cette richesse de l’amour de Dieu. Chaque jour, nous mesurons combien est grande la distance entre cet amour fou de Dieu, et ce que nous pouvons en vivre. La lettre de saint Paul aux Corinthiens nous incite au réalisme. Voilà pourquoi il est important que nous nous encouragions mutuellement à vivre en paix les uns avec les autres et à exprimer notre amitié.

En fin de compte, c’est bien l’enfant rencontré par saint Augustin qui a raison avec sans Jean : le mystère de notre Dieu sera toujours plus grande que notre cœur. C’est ce Dieu-là qui vient chez nous, qui veut faire sa demeure en nous, pour nous donner notre véritable dignité de filles et de fils du Père, par Jésus, dans l’Esprit. Quelle joie de pouvoir, aujourd’hui, ensemble, célébrer cette merveille.
Amen.

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